Par ce qu’il dit des associations autant que par ce qu’il ne dit pas, le rapport Attali (voir ici ma synthèse « associative ») donne une vision du monde associatif que je trouve assez désespérante.
C’est d’autant plus navrant que cette conception rétrograde est encore solidement ancrée dans notre administration française. Souvent, le secteur associatif n’est vu que comme un auxiliaire de la puissance publique.
Jugez-en par vous même :
Pour éduquer les enfants à la citoyenneté et les sensibiliser à l’intérêt général, il suffirait de les envoyer en stage dans une association et de les occuper une demi-journée par semaine à des taches d’utilité collective, toujours dans le cadre associatif.
Pour faciliter l’accès des TPE au conseil et au financement, notamment dans les « quartiers », il faut confier à des associations l’accompagnement des créateurs d’entreprises.
Pour développer la recherche médicale et hospitalière, c’est encore les associations qui sont convoquées, une nouvelle forme associative à créer, les associations à but scientifique et médical.
Pour prendre en charge les enfants et les jeunes dans les « quartiers », les associations encore et toujours. Pour permettre aux seniors de rester plus longtemps dans le monde du travail, les associations…
Bref, partout où l’Etat et ses services publics sont impuissants, ont perdu leur légitimité ou refusent d’intervenir par posture libérale, ce sont les associations qui doivent prendre la relève. Le tiers secteur ne serait qu’un gigantesque service para-public, récupérant les champs laissés libres par le désengagement ou la démission de l’Etat.
Ne vous méprenez pas ; ce que je critique, ce n’est pas le principe du désengagement de l’Etat. Au contraire, ce désengagement paraît souvent nécessaire tant les résultats obtenus sont médiocres au regard des quantités d’argent engagées.
Ce que je trouve navrant, c’est que la seule contribution des associations à la croissance réside dans la prise en charge de nos impasses sociétales. Quand l’Etat ne sait pas, ne veut pas ou ne peut pas faire, on pense immanquablement aux associations.
Quand on se retourne vers ces associations, que voit-on ?
Tout d’abord une kyrielle de microstructures (plus de 90% des associations en fonctionnement) portées par quelques bénévoles et fonctionnant avec un budget inférieur à 5.000 €. Ce ne sont pas elles qui prendront en charge nos chères têtes blondes, nos quartiers difficiles, les seniors exclus du marché du travail ou la collecte des fonds pour la recherche ; elles n’en ont pas les moyens.
Il y ensuite une grosse centaine de milliers de structures professionnalisées et déjà largement partenaires des pouvoirs publics, voire carrément délégataires de missions d’intérêt général. Ces structures fonctionnent déjà comme des béquilles administratives et partout où je vais, je les vois bien mal en point. Restrictions des financements publics, dysfonctionnements internes profond liés à la schizophrénie statutaire, amateurisme dans la gestion, absence de contrôle sur l’utilisation des fonds ; ces situations sont fréquentes et toutes ne résultent pas de la pénurie de ressources publiques.
Avant de penser que les associations feront mieux que l’administration, il faudrait prendre conscience de la relative misère du secteur associatif.
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