Association1901.fr

Association 1901 en difficultés financières : comment réagir ?

Par les temps qui courent, il me semble qu’un petit rappel à propos du comportement à tenir en cas de difficultés financières de votre association n’est pas inutile.

Evidemment, ces conseils restent généraux et les dirigeants devront adapter leur réaction à la situation spécifique de leur structure, son poids économique, la présence de salariés et le montant de ses dettes.

Je suppose donc une association régie par la loi de 1901 connaissant des difficultés financières, qui se traduisent dans la pratique par une trésorerie tendue, c’est-à-dire des difficultés (voire l’impossibilité) à honorer les paiements exigibles (salaires, factures des fournisseurs) avec la trésorerie disponible.

Tensions passagères ou difficultés structurelles ?

Il s’agit dans un premier temps de faire le point sur la cause des difficultés pour distinguer des situations de tensions passagères d’une insolvabilité structurelle.

Les tensions de trésorerie peuvent être provoquées par un gonflement temporaire des dépenses (lorsque celles-ci sont saisonnières, par exemple) ou un retard inhabituel dans la perception de recettes (le plus souvent des subventions publiques). En principe, ces difficultés ne remettent pas en question la viabilité de l’association et la solution se trouve (toujours en principe) chez votre banquier.

Sollicitez d’abord votre banque

Si votre structure a quelques années d’ancienneté, que son activité est lisible pour le banquier (pas trop exotique) et que les revenus de l’association présentent une certaine récurrence (base d’adhérents assez large, partenariat régulier et habituel avec des collectivités locales), le banquier acceptera peut-être de vous donner un coup de main en octroyant une facilité de caisse pour un montant raisonnable et une durée qui ne devrait jamais être supérieure à 3 mois. Eventuellement le banquier vous proposera de mobiliser une subvention à percevoir par bordereau Dailly, un système de crédit qui lui procure une sécurité supérieure au découvert accordé « en blanc ».

Cela vous aidera à passer le cap difficile et la situation bancaire reviendra dans l’ordre une fois que votre association aura perçu les revenus attendus.

Saisissez le juge

Une autre solution peut être envisagée ; elle est beaucoup moins connue mais tout aussi efficace que le crédit bancaire lorsque les difficultés ne sont que passagères. Il s’agit de la possibilité donnée à tout débiteur d’obtenir du juge un délai de grâce pour le règlement de ses dettes. Ce dispositif est ouvert par l’article 1244-1 du Code Civil qui stipule que « compte tenu de la situation du débiteur et en considération des besoins du créancier, le juge peut, dans la limite de deux années, reporter ou échelonner le paiement des sommes dues. »

En général, les juges octroient ce délai de grâce -qui peut aller jusqu’à 24 mois- assez généreusement, mais à la condition que les perspectives de redressement soient bien établies.

Notez bien que si vos dettes sont fiscales (impôts) ou sociales (URSSAF), seules les administrations concernées peuvent vous octroyer des délais de paiement.

Si la cessation de paiement résulte de difficultés structurelles ou insurmontables

Mais il se peut que ces difficultés soient le symptôme final d’une dégradation structurelle de la situation financière de votre association. En fait, deux types de situations sont ici visées : la mort lente par asphyxie ou un accident grave et brutal (pardon pour les images un peu macabres).

La mort lente correspond à la situation des associations qui accumulent des pertes. Lorsque l’association dépense plus d’argent qu’elle n’en gagne, elle constate des pertes comptables (ou déficit). Ce déséquilibre est d’abord masqué si l’association dispose de réserves (d’épargne) dans lesquelles elle pioche et/ou parce que ses fournisseurs (ou son banquier) lui font crédit et « financent » ses pertes. Mais tout cela ne dure qu’un temps : plus ou moins rapidement, les réserves sont consommées et un jour, les créanciers prennent peur en se rendant compte qu’ils portent la structure « à bout de bras ».

L’autre cas de figure est celui de l’accident grave : une condamnation aux prud’hommes, un redressement fiscal, un partenaire financier qui se désengage brutalement alors qu’il avait subventionnait régulièrement, une décision administrative interdisant de poursuivre l’activité…

Dans toutes ces situations, l’association doit payer des sommes qui sont hors de sa portée ou bien elle se retrouve privée d’un revenu essentiel au maintien de son activité ; elle ne peut plus faire face à ses dettes. C’est ce que les juristes appellent la cessation de paiements.

Prudence, car vous entrez en terrain miné

Face à des difficultés structurelles et insurmontables, il existe une forte probabilité pour que votre association disparaisse. C’est dommage mais rien ne sert de nier la réalité ; partout dans l’univers, les organismes qui s’avèrent trop fragiles ou inadaptés à leur contexte sont voués à la disparition : c’est une loi biologique.

En tant que dirigeant, votre objectif est alors d’éviter que soit mise en jeu votre responsabilité personnelle. Car dans cette phase terminale, un juge sera saisi du dossier de votre association et il vérifiera que vous avez correctement fait votre travail de dirigeant.

Il n’est pas dans mon propos ici de détailler le régime juridique des procédures collectives (anciennement le droit de la faillite) et je vous renvoie pour cela à la littérature spécialisée, dans l’attente d’un prochain billet à ce sujet.

Simplement quelques conseils et précautions de bon sens…

Renoncez aux expédients et autres acrobaties financières

C’est pour les dirigeants la principale difficulté : faire le deuil de la structure et se résoudre à sa disparition.

Si les difficultés sont insurmontables, rien ne sert de prolonger artificiellement l’existence de l’association. Vous risqueriez d’aggraver le passif (en augmentant les dettes) et cela pourrait vous être reproché par la suite. Donc renoncez à présenter au banquier un plan de redressement irréaliste pour obtenir le crédit de la dernière chance, abstenez-vous de tout montage improbable pour convaincre in extremis un nouveau partenaire financier.

Surtout n’injectez pas de deniers personnels dans l’association : personne ne vous en saura gré et cela ne changera pas la manière dont le juge appréciera la qualité de votre gestion.

Attention également si vous décidez de céder des actifs de l’association pour vous procurer de la trésorerie. Ce genre de décision ne doit pas se prendre dans l’urgence et suppose un large consensus au niveau de la collectivité associative, idéalement une décision d’assemblée générale.

Déclarez rapidement votre situation au tribunal

En tant que dirigeant d’une structure en cessation de paiement, vous avez l’obligation de saisir rapidement le TGI pour que celui-ci ouvre une procédure. Si les juges apprécient en général avec mansuétude la responsabilité des bénévoles, ils n’aiment guère que ceux-ci aient fait « l »autruche » face aux difficultés de leur structure.

Le « dépôt de bilan » de l’association doit donc se faire rapidement, à l’initiative des dirigeants, auprès du Tribunal de Grande Instance. La déclaration de cessation de paiements se fait au moyen du formulairecerfa 10530*01 qui est en principe disponible auprès de tous les greffes.

Un dernier conseil : n’agissez pas seul

J’allais oublier. La situation est tendue, vous fonctionnez dans l’urgence, vous êtes confrontés à des décisions difficiles. La prudence commande de ne pas agir seul : réunissez vos administrateurs, éventuellement convoquez un AG extraordinaire, saisissez vos autorités de tutelle, demandez l’avis de votre expert-comptable…

Bref, utilisez tous les moyens pour vous couvrir en informant (par écrit) les tiers de la situation déséspérée de votre association et en recueillant (par écrit) l’accord de vos pairs aux décisions difficiles qui s’imposent.

Publié initialement le : 10 décembre 2008