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Faire mieux plutôt que faire plus (stratégie associative)

Contrairement aux entreprises du secteur marchand, le succès d’une association ne se traduit pas nécessairement par une croissance continue des performances quantitatives. Deux siècles de soi-disant progrès économiques ont profondément imprégnées nos mentalités collectives avec un modèle productiviste qui n’est pas forcément de mise sous l’égide de la loi de 1901.

Pour illustrer mon propos (et en relation avec un précédent article à propos des associations primo-employeurs), je vous propose un petit cas pratique (farpaitement imaginaire) à propos d’une association fondée et animée par 6 bénévoles, des seniors, tous anciens ingénieurs ou scientifiques, avec pour objet de lutter contre la fracture numérique dont sont victimes nos ainés, en les initiant à la micro-informatique et internet.

Cas pratique Association pour la réduction fracture numérique Seniors

Disponibles, efficaces, motivés, l’équipe bien soudée a développé une capacité d’intervention à l’échelle interdépartementale. Aujourd’hui l’association s’est imposée comme un intervenant reconnu sur ce créneau et ses bénévoles revendiquent un savoir-faire certain pour accompagner de manière collective ou individuelle des publics seniors vers l’internet.

Après 6 années à développer les interventions, présente dans 3 départements, l’association cherche un nouveau souffle. La décision a été prise d’embaucher un salarié pour augmenter les capacités d’intervention. Dans ce but, il faut trouver des financements plus pérennes. Deux bénévoles se consacrent donc « à temps plein » à la recherche de partenaires.

Le choix pas toujours explicite de la croissance

Une approche plus comportementale conduit à s’interroger sur le choix individuel des deux bénévoles qui ont cessé les interventions auprès des personnes pour se consacrer à la recherche de financement. Quel contexte individuel a motivé cette reconversion : lassitude, envie de faire autre chose, besoin de redonner du sens à leur engagement quotidien ? Il faudra envisager la manière dont les personnes vivent ce changement de modèle.

Les logiques d’entreprise en vigueur dans le secteur marchand ne doivent pas induire chez les dirigeants associatifs la recherche systématique de croissance ou de gains de productivité. Les petites associations de membres ont une démarche moins « rationnelle » et doivent se centrer beaucoup plus sur les besoins exprimés ou cachés de leurs bénévoles et des personnes qui animent au quotidien les activités.

Après entretiens individuels, il apparait que trois des membres fondateurs de l’équipe aspirent à du changement. Après 6 années passées sur le terrain, ils voudraient faire évoluer leur engagement dans une perspective plus managériale. L’embauche d’un salarié leur parait un bon moyen de franchir un cap, en plaçant l’association dans une dimension entrepreneuriale.

Ils justifient également le changement de modèle par la nécessité de capitaliser sur le fort développement réalisé au cours des années. L’association se retrouve effectivement à la tête d’un confortable réseau d’anciens bénéficiaires de ses services. Elle dispose d’une abondante documentation papier et numérique, mainte fois fois revue et peaufinée. Le savoir-faire des bénévoles sur leur « métier » a fait l’objet de différentes formalisations.

Les alternatives au toujours-plus

Une hypothèse de travail est proposée comme alternative : le changement de modèle se fait à périmètre constant, à partir d’une reconversion du travail bénévole, selon les aspirations de chacun.La création d’un emploi salarié n’est pas exclue mais elle n’est plus considérée comme l’objectif stratégique principal.

Trois axes de réflexion sont envisagés :

Un développement quantitatif sécurisé

La partie la plus âgée du public cible de l’association reste sensible aux contraintes de déplacement et n’accède pas aux accompagnements qui sont essentiellement collectifs. On pourrait facilement optimiser le taux de fréquentation des séances initiation en assurant un service minimum de transport des usagers..Divers modes de prise en charge du transport sont envisageables (taxis, véhicules médicalisés, prise en charge CAF et caisses de retraite, covoiturage volontaire)

Si les fondateurs souhaitent le maintien du projet associatif dans sa dimension initiale de bénévolat de proximité, il reste possible de filialiser une activité salariée de services à domicile, par exemple, en bénéficiant de l’agrément spécifique. Pour s’épargner la peine de créer immédiatement une structure juridique dédiée, on peut également envisager un partenariat avec une association ou une entreprise de services à domicile déjà en activité.

Le partenariat avec une structure nouvelle ou existante du service à domicile permettrait de consolider un ou plusieurs emplois liés à des interventions au domicile des usagers.

Publié le : 20 octobre 2011