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Associations, concurrence et Intelligence Economique

Dans un commentaire sur un précédent billet, Laurent Martin me demande mon avis à propos d’un article d’outils froids à propos d’un nouveau débouché pour l’Intelligence Economique, la veille pour associations.

Précisons tout d’abord que je suis depuis la première heure un lecteur passionné d’outils froids. Il s’agit de l’une des premières ressources en ligne que j’ai consulté régulièrement quand je travaillais les questions de Knowledge Management pour le compte de réseaux bancaires (J’en reparlerai dans un prochain Top Blog).

Pourtant je n’ai pas commenté -ni même signalé- cet article (malgré tout le respect et l’admiration que j’éprouve pour Christophe Deschamps), parce que je crois qu’avant de transposer les méthodes et outils de l’intelligence économique au secteur associatif, il faut se livrer à une réflexion de fond à propos de la situation « concurrentielle » des structures de la loi de 1901 et des outils qu’elles doivent mettre en oeuvre pour améliorer leurs performances sociales.

Cette réflexion devrait à mon sens commencer par envisager les modalités réelles de la prétendue concurrence entre structures associatives.

Le rapport du MATISSE sur l’état du secteur associatif est sorti il y a quelques temps ; j’en ai parlé ici. La presse s’est emparée (et il faut s’en féliciter) des principales conclusions de ce rapport, notamment l’une d’entre elles concernant la situation de concurrence entre des structures toujours plus nombreuses se partageant des ressources (argent et bénévolat) de plus en plus rares.

Cette histoire de concurrence au sein du secteur associatif a visiblement bien plu et tout le monde l’a reprise. Il doit y avoir un petit côté « provoc » à associer le tiers secteur avec un paradigme dominant de notre économie capitaliste libérale ou bien comme un parfum de revanche du secteur marchand (chassez la concurrence par la porte, elle revient par la fenêtre…).

Constater l’effet de ciseau et écouter les dirigeants se plaindre de difficultés grandissantes à attirer bénévoles et argent public, est-ce pour autant mesurer un renforcement de la concurrence entre structures associatives ?

Si j’en crois mon expérience, je dirai que la question ne se pose pas vraiment dans ces termes.

Quand j’écoute des responsables dans les administrations centrales ou les collectivités locales, je les entends plutôt se plaindre de l’absence de concurrence. Ils sont souvent confrontés à l’offre unique et au monopole d’une association « historique » ou d’un grand réseau national qui confisque le marché. Sur certains territoires, on constate même l’absence de tout acteur associatif pour prendre en charge tel ou tel besoin d’utilité sociale.

De nombreux secteurs souffrent plutôt de l’absence de concurrence que de son excès.

D’autre part, certains dirigeants se plaignent de la difficulté à recruter et fidéliser les bénévoles. Cela serait la conséquence du trop grand nombre de structure par rapport aux bonnes volontés disponibles.

Pourtant trop nombreux sont les dirigeants qui persistent à considérer les bénévoles comme une ressource taillable et corvéable à merci, à qui l’on impose le silence en lui servant chaque fois que nécessaire l’habituel « ici on a toujours fait comme çà ! ».

J’ai souvent constaté que ceux qui se plaignent de la rareté de la ressource bénévole s’avèrent incapables de la valoriser correctement. Ce sont les maniaques du contrôle absolu, allergiques à toute forme de délégation. Les bénévoles fuient ces structures où les taches intéressantes sont confisquées par un petit nombre et l’adhérent de base considéré comme de la piétaille tout juste bonne à faire de la mise sous enveloppe.

Statistiquement, on constate que l’engagement bénévole se développe et que les Français sont toujours plus nombreux à se consacrer dans les associations à des activités extra-professionnelles. Il n’y a donc pas d’effet de pénurie mais simplement trop de structures qui ne savent pas répondre aux attentes des personnes qui se lient à leur projet.