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Subventions aux associations : comment gérer la disette financière ?

Dans tous les services de l’Etat et des collectivités territoriales, les crédits d’intervention destinés aux associations sont en diminution régulière depuis plusieurs années. Les fonctionnaires en charge de la distribution des subventions sont donc confrontés chaque année à la même question : comment répartir la réduction de l’enveloppe sur leur portefeuille d’associations subventionnées ?

La solution de facilité (une catastrophe programmée)

Dans de nombreux services, on résout ce problème de manière simple : puisque l’enveloppe disponible diminue cette année de 5% (par exemple), toutes les subventions accordées vont être diminuées de 5% ; de cette manière, le service tiendra son objectif de réduction des dépenses.

Cette méthode est inspirée d’une logique de « guichet », les associations subventionnées sont considérées comme des usagers du service public auxquels s’applique le principe d’égalité des usagers et de neutralité du service. Puisque le budget global se réduit, chacun doit voir sa subvention réduite dans les mêmes proportions. Face aux récriminations des associations, on pourra rétorquer : « C’est la crise, tout le monde est logé à la même enseigne ». Cette méthode est également la plus simple à mettre en œuvre ; elle permet de ne pas trop se poser de questions et surtout elle évite d’avoir à choisir entre les associations.

Mais il faut être conscient que cette manière de faire est catastrophique. En procédant de la sorte et en répétant l’opération chaque année, c’est tout le tissu associatif partenaire des pouvoirs publics qui est progressivement affaibli, les structures voyant leur santé financière s’éroder lentement mais surement. Les services détruisent ainsi à petit feu et de manière relativement indolore le réseau associatif qui relaie sur le terrain leurs politiques publiques.

Une vision erronée du partenariat « Association-Pouvoirs publics »

La logique de guichet, dans laquelle tous les bénéficiaires de subventions sont logés à la même enseigne, résulte d’une vision erronée de la subvention et de la nature du partenariat entre les pouvoirs publics et les associations.

Recevoir une subvention n’est pas l’exercice d’un droit, à propos duquel il faudrait assurer l’égalité entre les bénéficiaires, au nom du principe de neutralité.  La subvention est l’expression d’un soutien que l’administration apporte à une association (ou à certains de ses chantiers) parce que les projets qu’elle conduit sont en phase avec les objectifs des politiques publiques.

La subvention est l’un des éléments de ce partenariat qui se noue entre l’administration et l’association au service de l’intérêt général, dans le champ d’action de l’association subventionnée.

Dès lors, en période de disette budgétaire, les fonctionnaires doivent se donner les moyens de choisir entre les associations qui sont utiles et celles qui le sont moins. J’avais déjà écrit à propos de cette exigence en proposant de réserver les subventions à des associations exemplaires (voir ici). La grande crise budgétaire dans laquelle nous sommes engagés depuis quelques années (et pour quelques années encore) doit être l’occasion pour les services de « faire le ménage » dans leur portefeuille d’associations subventionnées et de trier entre le bon grain et l’ivraie.

Courage politique et objectivation de la contribution associative

Pour faire ce ménage, il faudrait évidemment un certain courage politique. De trop nombreuses associations subventionnées n’ont pour seule raison d’être que de verser des rentes aux amis du pouvoir. Ces associations sont en général bien connues des services instructeurs : à la première anicroche, elles se précipitent sur leur téléphone pour faire jouer le « levier politique ».

Mais cela ne suffira pas : il faut également que les services instructeurs se donnent plus de moyens pour objectiver, mesurer, documenter la contribution des associations subventionnées à l’intérêt général et aux politiques publiques dont ils sont en charge. Trop souvent, selon mon expérience, ces outils  ne sont pas pleinement opérationnels, quand ils ne sont pas tout simplement inexistants.

Évidemment, dans le service, on connait les « bonnes » associations et celles qui ne servent à rien. Mais ces données ne sont pas toujours objectives, pas suffisamment documentées ; elles sont dès lors difficilement opposables au décideur politique. Pourtant cette objectivation de la contribution de l’association subventionnée aux politiques publiques est en principe obligatoire pour le renouvellement de la convention de subvention (Voir ici la circulaire du 1er décembre 2000 relative aux conventions pluriannuelles d’objectifs entre l’Etat et les associations, dite Circulaire « Jospin »).

Au-delà de cette évaluation, souvent mal comprise par les parties en présence et toujours mal perçue par les associations, il faut revigorer la pratique du dialogue de gestion, cet échange au fil de l’eau entre les partenaires -association et pouvoirs publics- à propos des projets financés par la subvention.

Il faut également que les services se dotent d’outils et de procédures permettant d’historiciser le partenariat, non pas dans sa seule dimension comptable. mais en privilégiant une approche qualitative.

Nous en reparlerons…