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Fonder un partenariat « entreprise-association » avec un apport associatif

Un p’ti cas pratique…

J’ai publié à propos des avantages de l’apport associatif, notamment lorsque l’on stipule un droit de reprise, pour assurer une certaine sécurité juridique à l’association et à la personne apporteuse. Je voudrais illustrer d’autres avantages de ce montage, ici dans le domaine du couplage « association-entreprise marchande« , un dossier dont nous n’avons plus parlé depuis un certain temps.

Un parc botanique co-exploité par une SARL et une association

Je vais partir d’un cas pratique presque fictif impliquant un parc botanique exploité par une SARL. Les dirigeants constatent qu’il sont conduits à organiser ou accueillir sur leur site différents chantiers à caractère social, éducatif ou environnemental, qui échappent à la logique marchande. Ils souhaitent officialiser cette orientation vers l’intérêt général en confiant différents projets se déroulant sur le parc à une association à but non lucratif.

Ces chantiers concernent l’accueil de salariés handicapés, l’animation de visites à destination de publics particuliers (scolaires, handicap, insertion, etc), l’organisation d’activités socioculturelles à destination d’un public de proximité, l’entretien sur le parc de matériels signalétiques à vocation pédagogique, la conduite de projets de sauvegarde d’espèces botaniques rares ou menacées.

L’équilibre financier de l’association repose à hauteur de 30% de son budget sur les cotisations qu’elle prélève auprès de ses membres -les visiteurs du parc-, la contrepartie de cette cotisation se situant dans la participation aux activités socioculturelles et environnementales de l’association et la gratuité d’une visite offerte aux résidents de la commune.

Le solde du budget (environ 20.000 euros par an) étant apporté par la SARL, sous forme de subvention annuelle de fonctionnement. La SARL met également à disposition de l’association du personnel, pour des activités d’animation.

Comment organiser une relation claire et équitable

Les objectifs exprimés portent sur un montage juridique clair traduisant sur un modèle économique équitable et sécurisé. Il faut trouver la qualification adaptée pour la subvention de fonctionnement, notamment sur le plan fiscal,

On cherche à réduire les risques et les flux financiers mais aussi à régler le statut juridique du personnel mis à disposition, sachant que la SARL met à disposition de l’association une partie de son personnel pour les missions d’intérêt général réalisées sur le parc.

Il existe également un risque fiscal lié à la présence de dirigeants communs dans les deux structures et au fait que la subvention annuelle est passée en charges d’exploitation de la SARL et déduite pour le calcul de son résultat fiscal.

Une solution ; l’apport associatif avec droit de reprise

Comme un don, l’apport associatif permet à un membre de l’association de transférer à la personne morale un ensemble de biens et de droits, le plus souvent il s’agit d’un immeuble ou d’une somme d’argent. Les biens ainsi apportés viennent augmenter le patrimoine de l’association mais l’apporteur peut se réserver le droit de reprendre son bien, à l’issue d’une certaine période ou si l’association ne remplit plus certaines exigences.

Ce droit de reprise et ses accessoires sont assez pratiques pour protéger le généreux apporteur contre les aléas de la vie associative et un possible détournement des biens apportés. L’apport est également préférable à la donation dans la mesure où il ne supporte pas les droits d’enregistrement épouvantables qui peuvent être réclamés par le fisc aux associations bénéficiaires de dons ou legs.

Dans un couplage « association-entreprise », l’apport avec droit de reprise peut être préféré à la subvention de fonctionnement, dans la mesure où son régime fiscal est neutre, pour l’association comme pour l’entreprise.

Nature de l’apport

L’apport peut se limiter à une somme d’argent, éventuellement libérée par échéances progressives. A une certaine échéance, la somme d’argent fait l’objet d’un remboursement global par l’association, sans intérêts, ni réévaluation. Par le biais de la clause résolutoire, l’apporteur est protégé contre un détournement abusif du bien et d’éventuelles difficultés financières de l’association, le montant apporté est remboursé avant l’ouverture de la procédure collective, par priorité sur les autres créanciers.

L’apport peut également porter sur du matériel ou un immeuble. dans ce dernier cas, il doit être effectué par acte notarié. Rien n’interdit de prévoir un apport mixte, c’est-à-dire composé de différents types de biens. Dans notre dossier, l’apport portera sur une certaine somme d’argent ainsi que :
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Mise à disposition de personnel sous couvert d’apport en industrie

Est-il possible pour une personne morale, en l’occurrence la SARL, de faire un apport en industrie, à réaliser par le travail salarié de personnel qu’elle embauche et met à disposition de l’association bénéficiaire. En droit des sociétés, il est possible pour une personne morale de faire un apport en industrie dans le cadre de la constitution d’une société. La solution doit donc être transposée au domaine associatif.

Dans notre dossier, la mise à disposition du personnel par la SARL au bénéfice de l’association pourra donc être « couverte »  par le traité d’apport qui pourra désigner par exemple le contrat de travail nominatif du (des) salarié(s) mis à disposition.

Libération progressive des apports

Rien n’interdit de prévoir une libération progressive de l’apport financier en débloquant tous les ans par exemple une tranche du financement. De cette manière, l’apport ne pèse pas plus qu’une subvention annuelle sur la trésorerie de l’apporteur et on évite que le capital transféré en totalité courre le risque d’une faillite ou d’un détournement de l’objet prévu.

Absence d’intention libérale de la part de la SARL apporteuse

Comme nous l’avons expliqué ici, le risque de ce montage est la requalification éventuelle par le fisc de l’apport en don, avec à la clé un redressement fiscal portant sur les droits d’enregistrement. Il faut donc dans le traité faire apparaître sans ambiguïté l’absence d’intention libérale de la part de la SARL, en démontrant qu’elle retire de l’opération un certain avantage.

Cette absence d’intention libérale sera documentée d’abord par la stipulation d’un droit de reprise portant par exemple sur tout ou partie des sommes apportées (l’apport en industrie ne pouvant pas faire l’objet d’un droit de reprise). Mais ce n’est pas suffisant ; il faut que la SARL retire de ce partenariat et de son apport des avantages indéniables. Le traité d’apport pourrait donc stipuler différentes « charges » auxquelles l’association s’engage, comme l’entretien de la signalétique pédagogique sur le parc ou l’organisation d’événements à caractère socio-culturels (voir à ce sujet notre article cité plus haut).

Reprise des apports et clause résolutoire

Le traité d’apport prévoira une clause de reprise et une clause résolutoire.

La clause de reprise est essentielle pour démontrer l’absence d’intention libérale, comme il a été dit plus haut. Elle fixera une échéance raisonnable pour le remboursement des sommes qui ne peuvent faire l’objet d’aucune indexation.

La clause résolutoire protègera l’apporteur d’une éventuelle procédure collective ouverte à l’encontre de l’association et le non-respect des engagements (« charges ») prévus au traité.

Quels sont les bénéfices du montage ?

A l’instar d’une convention de partenariat, l’apport permet de régler les relations juridiques entre les deux structures et de définir précisément les missions imparties à l’association sur le parc (clauses relatives aux charges de l’apport).

La libération progressive de l’apport financier se substitue à une subvention annuelle mais permet au cas où l’association dégagerait un jour des excédents financiers de considérer cette somme comme un prêt et donc de la rembourser à la SARL, le moment venu. Sur le plan fiscal, l’apport n’est pas une recette de l’association, ni une charge déductible pour la SARL.

L’apport en industrie règle également la question de la mise à disposition du personnel par la SARL au profit des missions d’intérêt général portées par l’association.