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Gestion de l’association loi 1901 : quelques précautions juridiques

Si vous avez eu la curiosité de consulter la loi de 1901, vous vous êtes certainement étonné qu’elle ne contienne aucune disposition sur la manière dont les associations doivent s’organiser et fonctionner en interne. C’est volontaire : les rédacteurs de la loi ont voulu laisser aux fondateurs d’associations la possibilité de s’organiser comme ils l’entendent.

Cela ne signifie aucunement que les dirigeants associatifs ont « carte blanche » pour faire fonctionner la structure à leur guise. L’association a bien une loi qui régit son fonctionnement interne, ce sont ses statuts qui, conformément à l’adage juridique, sont « la loi des parties ».  Cette « loi privée » s’applique à tous les membres de l’association, à commencer par les dirigeants.

Pour cette raison, la première précaution à prendre pour des dirigeants nouvellement élus est de lire soigneusement les statuts de leur association. Trois aspects du fonctionnement doivent faire l’objet d’une attention particulière : le processus d’adhésion et les relations avec les membres, l’organisation des assemblées générales et le fonctionnement des instances dirigeantes.

L’adhésion et les relations avec les membres

Ces questions sont source de conflits de plus en plus nombreux entre les associations et leurs adhérents. Pour cette raison notamment, la gestion des « entrées et des sorties » dans votre association doit être des plus rigoureuses.

En ce qui concerne l’adhésion des membres, les statuts de l’association peuvent prévoir certaines conditions à remplir par les adhérents (âge, versement d’une cotisation, signature d’une charte, …).  Les dirigeants doivent dans ce cas respecter scrupuleusement ces conditions, afin d’éviter de créer des précédents. Des candidats ne remplissant pas les conditions statutaires pourraient tirer argument de ces entorses faites aux statuts et se prévaloir devant le juge d’un usage de l’association (Un usage est une habitude qui se poursuit depuis suffisamment longtemps pour venir modifier le droit ou le créer).

Par ailleurs, même si les statuts sont muets à ce sujet, une association garde toujours la faculté de refuser une adhésion, sans avoir à justifier sa décision. Ce refus ne doit toutefois pas être abusif aux termes de la jurisprudence, c’est-à-dire entouré de circonstances portant préjudice à la personne (publicité donnée au refus, justification du refus par des motifs erronés). Pour cette raison, l’association refusant une candidature se gardera bien d’en expliquer les raisons, sauf évidemment si les statuts imposent que ce refus soit motivé.

Attention : certains statuts associatifs prévoient que « l’adhésion est libre et ouverte à tous ». Dans ce cas, il nous paraît plus difficile de refuser une candidature.

En ce qui concerne la participation aux activités de l’association, celle-ci peut être réservée par les statuts aux adhérents. Là encore, il faut être rigoureux car les conséquences d’une négligence peuvent être lourdes, aussi bien sur le plan fiscal (perte du bénéfice du régime de l’association « fermée ») qu’en termes d’assurance (l’assurance de responsabilité civile de l’association ne couvre que les adhérents).

L’exclusion ou le refus de renouvellement de l’adhésion sont toujours délicats à gérer. En effet, on voit depuis quelques années se multiplier les contentieux à ce sujet, les adhérents écartés n’hésitant plus à porter leur conflit avec l’association devant les tribunaux.

La situation la plus confortable pour les dirigeants est certainement celle où les statuts (éventuellement le règlement intérieur) prévoient de manière plus ou moins détaillée une procédure disciplinaire, avec une liste de motifs d’exclusion et les formalités à respecter par l’association pour se séparer de l’un de ses adhérents. Dans ce cas, il suffit de respecter à la lettre la procédure et de se ménager toutes les preuves nécessaires (procédure écrite, courriers en recommandé avec AR).

Attention toutefois à respecter les droits fondamentaux de la défense (voir ci-dessous) qui peuvent être vérifiés par les tribunaux, même en présence d’une procédure précise prévue par les statuts.

Dans le silence des statuts, il faudra prendre encore plus de précautions, car en cas de recours aux tribunaux, la situation sera appréciée par le juge qui vérifiera que les droits de la personne exclue ont bien été respectés.

Avant de prononcer la sanction ultime, à savoir l’exclusion de l’adhérent, les dirigeants devront donc s’assurer notamment que les conditions suivantes ont bien été remplies :
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La tenue des assemblées générales

La plupart des statuts, y compris les plus dépouillés, donnent des indications sur la tenue de l’assemblée générale. Organe souverain de l’association, cette assemblée réunit la communauté des adhérents pour exercer ses prérogatives fondamentales, à savoir la définition des grandes lignes du projet associatif et le contrôle de l’équipe dirigeante.

Le respect des dispositions statutaires relatives aux assemblées générales est fondamental, car il conditionne la validité des décisions prises par l’assemblée. Des contestataires auraient beau jeu de demander au tribunal d’annuler les décisions prises, s’ils pouvaient prouver que l’assemblée ne s’est pas tenue conformément aux exigences des statuts.

Si les statuts sont muets à ce sujet, il faudra néanmoins respecter quelques précautions de bon sens garantissant une certaine transparence et un minimum de démocratie (bien que la loi de 1901 n’impose nullement aux associations de fonctionner de manière démocratique et républicaine).

Ces précautions concernent notamment la convocation des adhérents à l’assemblée, le décompte des présents et des votes et l’établissement d’un procès-verbal.

A défaut de précisions dans les statuts, la convocation des adhérents peut être faite par tout moyen adapté. Ainsi la remise « en main propre » de la convocation, un courrier simple ou même un courriel sont envisageables du moment que l’on peut prouver que l’ensemble des membres a été touché par la convocation. Par contre l’affichage communal ou la parution de la convocation dans un journal d’annonces légales est peut probant car on peut facilement imaginer que tous les membres ne résident pas sur le territoire de la commune ou qu’ils ne lisent pas le journal d’annonce.

En ce qui concerne le délai entre l’envoi de la convocation et la date de tenue de l’assemblée générale, un délai « suffisant  et raisonnable» sera demandé par le juge en l’absence de précisions statutaires. Ce délai doit être en proportion de la taille de l’association et de sa situation. Il a été jugé qu’un délai d’un mois était suffisant ; en revanche, un délai de trois jours a été jugé trop court.

La convocation comporte évidemment la date, l’heure et le lieu de l’assemblée générale, mais également son ordre du jour. Les adhérents doivent être informés des questions qui seront traitées et pouvoir décider en toute connaissance de cause si l’ordre du jour de l’assemblée justifie leur présence. L’ordre du jour peut être une simple liste des résolutions à voter.

L’usage consistant à terminer l’ordre du jour par un point intitulé « Questions diverses » est à manier avec prudence. Ces questions diverses peuvent être consacrées à des débats ou des informations, mais ne doivent déboucher sur aucune décision, ni vote, sous peine de voir ces résolutions annulées par le juge.

Au moment de l’assemblée, il est important de tenir une liste d’émargement sous la forme d’un tableau où les présents indiquent leurs noms et prénom et signent (émargement). Les titulaires de procuration indiqueront également le nombre de pouvoirs dont ils sont porteurs ; ces pouvoirs seront annexés à la liste d’émargement et conservés avec elle.

La liste permet d’établir avec certitude le nombre de présents (éventuellement augmenté des personnes ayant donné pouvoir) qui servira au décompte de la majorité dans le vote des résolutions. Lorsque les statuts prévoient un quorum (nombre minimum de présents à l’assemblée pour qu’elle soit en mesure de délibérer), c’est encore la liste d’émargement qui permet de prouver que le quorum a bien été atteint.

A défaut de précision dans les statuts, la procuration est de droit, conformément au principe juridique qu’il est toujours possible de se faire représenter dans les actes de la vie civile. Le nombre de procurations détenues par une personne n’est pas non plus limité. En revanche, le vote par correspondance (l’adhérent renvoyant une feuille sur laquelle il indique son vote pour chacune des résolutions) doit être prévu par les statuts ou autorisé par un usage ancien et constant en vigueur dans l’association.

Dans le silence des statuts, toutes les décisions de l’assemblée sont prises à la majorité simple, c’est-à-dire la moitié des votes exprimés, plus une voix.  Le président et les autres membres du bureau disposent d’une seule voix, sauf à ce que les statuts prévoient expressément des modalités différentes.

Seules les questions prévues à l’ordre du jour peuvent être soumises au vote de la communauté associative. Les juges appliquent ce principe avec grande rigueur, annulant toute résolution qui n’aurait pas figuré dans la convocation.  La seule exception à ce principe concerne la révocation des dirigeants qui est toujours possible au cours d’une assemblée, si des circonstances révèlent des faits justifiant l’impossibilité pour les membres de l’association de maintenir leur confiance dans l’équipe dirigeante. On parle alors de « révocation sur incident de séance ».

L’assemblée doit faire l’objet d’un procès-verbal. Au minimum, il s’agit de reprendre les différentes résolutions débattues et d’indiquer pour chacune d’entre elles le résultat du vote, en détaillant les voix « pour », « contre » et les abstentions. Pour garantir l’impartialité du compte-rendu d’assemblée, il est d’usage de solliciter un ou plusieurs membres de l’assemblée n’appartenant pas aux instances dirigeantes, qui participeront à la rédaction du procès-verbal.

Une fois rédigé, le procès-verbal sera signé des dirigeants et on y annexera la feuille d’émargement ainsi que les procurations. Ces documents seront conservés indéfiniment dans le registre des délibérations.

Le fonctionnement des organes dirigeants

Dans la plupart des associations, le bureau ou le Conseil d’administration ont en charge la direction de l’association. Alors faut-il également documenter les réunions de ces organes comme on le fait pour l’assemblée générale, si les statuts ne prévoient rien à ce sujet ?

Il est un cas où cela nous paraît indispensable, c’est lorsque l’association emploie des salariés qui ont en charge la gestion quotidienne des activités de la structure. Dans ce cas effectivement, il pèse sur l’association un risque juridique lié à l’éventuelle requalification des salariés en « dirigeants de fait ». Cette requalification peut avoir lieu si le juge constate que les salariés sont en fait livrés à eux-mêmes et que les instances dirigeantes n’exercent aucun contrôle de leurs activités ; elle peut entraîner de graves conséquences sur le plan juridique et fiscal.

Pour se prémunir contre ce risque de requalification, il faudra prouver que les instances dirigeantes ont bien exercé un contrôle sur les salariés en charge de la gestion quotidienne. Cette preuve sera facilement apportée en présentant les comptes-rendus des réunions de bureau ou de conseil d’administration, au cours desquels la gestion des salariés a été examinée par les dirigeants bénévoles ou les administrateurs.

Retrouvez cet article et toutes les bonnes pratiques de gouvernance d’une association loi 1901 dans notre aide-mémoire juridique