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Bénévole et seul au monde

Edit : Je publie à nouveau cet article rédigé en 2009 pour y ajouter un complément relatif aux bénévoles qui accompagnent l’un de leur proche en fin de vie, en relation avec ce que je désigne dans le texte comme un bénévolat de parentalité.
On trouvera ce complément relatif à l’Allocation journalière d’accompagnement d’une personne en fin de vie à la fin de l’article.


La semaine dernière,  Monsieur Marie me parlait de ces très nombreux bénévoles qui sur le terrain s’engagent en dehors de tout cadre juridique formalisé.

Si dans ces colonnes, nous nous attachons à donner aux structures et à leur dirigeants les moyens de fonctionner efficacement, nous n’oublions pas non plus que dans la vraie vie, de nombreuses initiatives de proximité, d’innombrables manifestations du lien social ne fleurissent pas à l’ombre généreuse de la loi de 1901.

Il faut se souvenir que de la même manière que toutes les associations 1901 ne reposent pas sur le bénévolat, tous les bénévoles ne fonctionnent pas dans le cadre d’une association régie par la loi de 1901.

En France, des dizaines de milliers de personnes contribuent quotidiennement à des taches d’intérêt général sans être couverte par un statut juridique quelconque. Elles ne sont ni adhérents d’une association, ni salariées d’une entreprise ou d’une administration. Il s’agit d’initiatives personnelles d’individus qui font don de leur temps ou de leurs compétences, directement sur le terrain, sans se poser trop de questions ; elles privilégient l’action avant tout.

Les bénévoles « franc-tireurs » ?

Qui sont ces âmes généreuses qui prennent des risques sur le terrain ?

Une petite liste à la prévert, qu’il vous appartient de compléter :

Il faudrait les appréhender statistiquement mais, sans prendre de risques, je peux dire qu’il s’agit de centaines de milliers d’Equivalent Temps Plein, qui chaque année contribuent au PIB secret de notre pays, en dehors de tout statut juridique et de toute comptabilisation sérieuse.

On peut regretter que tous ces gestes de solidarité échappent à toute forme de protection juridique.

En effet, en absence de statut légal, ces personnes s’exposent aux risques physiques des activités auxquels elles participent librement ainsi qu’aux risques juridiques liés à l’éventuelle mise en cause de leur responsabilité. Le fait d’être bénévole n’a jamais constitué une excuse sur le plan juridique, tout au plus la responsabilité du bénévole est interprétée par les juges moins sévèrement que celle du salarié ou du fonctionnaire.

Bénévolat de parentalité et de voisinage

Lorsque l’un des proches arrive en fin de vie, de nombreuses personnes s’arrêtent de travailler pour l’accompagner. Ce bénévolat de parentalité peut donner lieu à une modeste indemnisation de la part de l’Etat par le biais d’une allocation spécifique (voir plus bas) mais rien n’est prévu pour la prise en charge des risques d’accident et de la responsabilité civile.

Dans le cadre scolaire, les solutions sont à rechercher du côté associatif ; les assurances scolaires peuvent couvrir les dommages subis par les accompagnants, plus rarement leur responsabilité civile. Les assurances contractées par les associations organisant des activités parascolaires doivent en principe couvrir la responsabilité des parents impliqués dans les activités, mais cela reste toujours à vérifier.

Pour la solidarité de voisinage, c’est le grand vide. Après avoir visité Madame Georgette, votre voisine de pallier pendant des années, impotente et recluse à son domicile, vous pouvez être trainé en justice par ses héritiers qui vous reprocheront de l’avoir maltraitée.

Ces solidarités quotidiennes, ces petits moments d’humanité offerts restent inconnus du public, invisibles au yeux des administrations et finissent par se dérouler aux « risques et périls » des aidants bénévoles. C’est injuste et idiot.

Les collaborateurs occasionnels du service public.

Pour « Tatie » Michèle qui s’est cassée la jambe en accompagnant les enfants avec les dames du CCAS, il existe un statut forgé par la jurisprudence, celui de collaborateur occasionnel du service public, qui organise une certaine protection pour les personnes qui bénévolement se mettent au service de l’intérêt général et « prêtent main forte » aux services publics.

La personne qui apporte son concours à l’exécution d’un service public et qui subit un dommage peut se voir indemniser par l’Administration sans avoir à prouver une faute de celle-ci. Il faut alors plusieurs conditions à réunir pour que le collaborateur bénévole puisse obtenir réparation:

*condition de recours a la collaboration. Certains arrêts estiment que la collaboration doit être justifiée par une urgente nécessité, mais le jugement interprète largement cette condition: 70, Gaillard: conditions remplies pour le juge (personne qui entendant criée au secours sa voisine alors que celle si est tombé dans une fosse dans son jardin). En revanche, si un malade dans un hôpital se blesse en aidant 6 infirmiers pour en faire monter un dans une ambulance, la condition n’est pas remplie.

*Il faut une collaboration à un vrai service public, mais la jurisprudence n’exige pas un service public forcément organisé (secours aux personnes en danger dans une commune, même si le service n’existe pas, il est censé exister de droit).

*la personne qui demande réparation doit avoir effectivement la qualité de collaborateur du service public. Ce n’est pas le cas d’une personne qui assiste à l’arrestation d’une personne. De même pour un usager, car la qualité d’usager et supérieure à celle de collaborateur bénévole et la jurisprudence estime que la collaboration est une contrepartie des avantages que procure le service. Il n’y a pas de responsabilité sans faute pour un élève qui passe les épreuves sportives du bac et qui est chargé de ramasser les poids et qui est blessée; de même pour la personne qui participe bénévolement à une course de chevaux: pas de responsabilité sans faute car c’est un usager.

Le Conseil d’Etat ne retient pas pour écarter ce régime des considérations telles que le lieu où l’accident s’est produit (ouvert au public ou privé). Il ne s’est pas attaché au lien de parenté dans l’hypothèse où le collaborateur secourait le cousin de son épouse et qui a fait joué la qualité lorsque des frères et soeurs se portent secours.

C’est justement le sort de ces bénévoles « franc-tireurs » que la Fondation du Bénévolat s’attache à améliorer au quotidien. En proposant aux Mairies d’assurer gratuitement les bénévoles qui contribuent à leurs services publics, la Fondation du bénévolat dévoile un pan secret de notre économie sociale. Elle fait également œuvre bien utile en déchargeant les collectivités territoriales d’une source potentielle de risques financiers.

Les dirigeants d’ associations non déclarées

Je pense aux nombreuses amicales et autres « classes d’age » qui existent en région.

Ces associations de fait existent et fonctionnent sans reconnaissance légale. Elle peuvent également percevoir des cotisations et organiser des activités. Dans les banques, on leur ouvre un compte avec un chéquier (mais on évite de leur faire souscrire un livret).

Quid du statut non écrit de leurs dirigeants, président choisi, voire proclamé et des personnes bénévoles impliquées dans l’organisation des activités collectives  ?

Chantiers d’auto-construction

Je veux profiter de ce billet pour attirer l’attention sur le triste sort que l’on fait à l’auto-construction dans notre pays. Les chantiers collectifs d’auto-construction peinent à trouver un statut juridique adapté et bienveillant. Dans les zones rurales mais aussi auprès d’une nouvelle génération, les mécanismes de solidarité ancestraux en relation avec l’habitat sont confrontés à une application rigide de la règlementation et une approche purement réglementaire du bénévolat.

A moins d’adopter la forme associative (ou ici les castors d’alsace une solution d’assurance associative et commerciale), les chantiers d’auto-construction sont confrontés à la difficulté d’assurer correctement les participants bénévoles.

Il faudrait que les politiques se saisissent de ce dossier…

Consulter les sites des Castors, mouvement associatif autour des chantiers d’auto-construction.


Edit 15 avril 2013 : Complément

Allocation pour l’accompagnement d’un proche en fin de vie

Tout actif, dont un proche souffrant d’une pathologie mettant en jeu son pronostic vital ou étant en phase avancée ou terminale d’une affection grave et incurable, quelle qu’en soit la cause, peut suspendre son activité professionnelle pour être auprès de lui, tout en bénéficiant d’une compensation financière : l’allocation pour l’accompagnement d’un proche en fin de vie.

Les salariés qui bénéficient d’un congé de solidarité familiale ou qui l’ont transformé en période d’activité à temps partiel peuvent également prétendre à cette allocation. Peuvent aussi accéder à cette allocation, les chômeurs indemnisés et dès lors qu’ils ont suspendu ou réduit leur activité, les travailleurs non salariés, les exploitants agricoles, les professions libérales et les ministres des cultes.

La demande d’allocation doit être déposée, conformément au décret (n°2011-50) du 11 janvier 2011, auprès de l’organisme dont relèvent, en cas de maladie, les demandeurs.

Plus de renseignement sur cette allocation dont le montant reste malgré tout modeste.