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Association transparente ou parapublique : comment la reconnaître ?

J’avais développé dans un précédent article les risques juridiques qui pesaient sur le fonctionnaires et élus impliqués dans le fonctionnement d’une association loi 1901. L’un de ces risques –la gestion de fait– concerne les personnes impliquées dans le fonctionnement d’une association transparente, également dénommée association para-administrative.

Au sens de la jurisprudence, l’association transparente n’est pas celle qui publie régulièrement ses comptes et informe les tiers de sa situation économique ; c’est au contraire une structure un peu opaque qui fonctionne sous la coupe de l’administration et qui fait l’objet de la suspicion des juges.

Pourquoi tant de haine ?

La théorie de la transparence est apparue dans les années 1960 pour sanctionner des montages utilisant la structure de la loi de 1901 dans le but d’échapper aux règles de la gestion publique, voire abriter des pratiques délictueuses, comme la constitution par des collectivités de budgets occultes.

L’association transparente n’a donc pas bonne presse auprès du juge administratif et de la Cour des Comptes, celle-ci sanctionnant depuis trente ans le caractère abusif de ces montages, à la fois peu conformes à l’esprit de la loi de 1901 et potentiellement porteurs de dérives. Aussi, dans le cadre du contentieux ou du contrôle, la qualification d’association transparente entraine de multiples conséquences : annulation des contrats, requalification du statut des agents, mise à la charge de la collectivité du passif de la structure…

Sur le plan comptable et financier, les fonds manipulés par l’association reconnue comme transparente ne perdent pas leur qualité de deniers publics et restent soumis au principe de séparation entre ordonnateurs et comptables. La disposition par l’association de ces fonds requalifiés en deniers publics peut donc entrainer l’application du régime de la gestion de fait, régime assorti de sanctions pécuniaires et pénales.

Si les dirigeants gestionnaires de fait sont des élus, ils deviennent justiciables de la Cour de discipline budgétaire qui peut prononcer à leur encontre une amende et les suspendre de leur fonction d’ordonnateur.

Des critères jurisprudentiels

Ce sont principalement deux arrêts du Conseil d’Etat (C.E. Département de la Dordogne, 5 décembre 2005 et C.E. Commune de Boulogne-Billancourt, 21 mars 2007) qui ont fixé les 4 critères qui permettent au juge de qualifier une association de « transparente ».

Il s’agit :

Ces critères sont cumulatifs et examinés selon la technique du « faisceau d’indices » qui conduit à considérer qu’un seul critère n’est à lui-seul suffisant pour emporter une requalification.

Le Conseil d’Etat a reformulé ce faisceau de critères dans sa décision du 21 mars 2007 en énonçant que « lorsqu’une personne privée est créée à l’initiative d’une personne publique qui en contrôle l’organisation et le fonctionnement et qui lui procure l’essentiel de ses ressources, cette personne privée doit être regardée comme « transparente ».

La Cour des Comptes et ses chambres régionales ne manquent pas de s’appuyer sur le faisceau de critères formulé par le Conseil d’Etat (Pour un exemple, voir 22 septembre 2010 [download id= »52″]).

Associations constituées par des acteurs publics

La création de l’association transparente se fait à l’initiative d’une ou de plusieurs personnes morales de droit public. Lorsque l’association est suspectée de transparence, la pratique des Chambres régionales est de rechercher si une seule collectivité ou entité de droit public détient au sein de l’association une influence prépondérante, de par la gouvernance statutaire ou effective, combinée éventuellement à un financement majoritaire (Par exemple ici – 03 avril 2001 [download id= »53″]).

Contrôle de l’organisation et du fonctionnement par la personne publique

Pour vérifier si ce critère est rempli, les juges examinent tant l’organisation statutaire que la gouvernance effective de l’association au travers des délibérations de ses instances. Ce qui est recherché, c’est l’existence (ou l’absence) d’une réelle autonomie de décision pour l’association qui doit fonctionner dans une certaine indépendance vis-à-vis de ses fondateurs.

A cet égard, l’absence de convention entre les personnes publiques et l’association est toujours un indice d’une autonomie insuffisante. Pour un exemple de manque d’indépendance, voir [download id= »51″]

Absence d’autonomie financière

La structure des recettes de l’association ne doit pas caractériser une dépendance financière et matérielle à l’égard d’une des collectivités qui la subventionnent, dépendance qui serait de nature à la priver d’autonomie.

Ce critère est de facto rempli pour les nombreuses associations qui sont tributaires des largesses d’un unique dispensateur de subvention. Toutefois, le critère de l’autonomie financière est interprété de manière souple par les juges, notamment dans l’application de la notion de gestion de fait.

La Cour des comptes a ainsi pu écrire dans son rapport pour l’année 2000 (Étude sur l’intervention des associations dans le domaine des politiques sociales 1ère partie, chapitre II, section 3)

« Pour ce qui est des contrôles pouvant être conduits par la Cour, les ambiguïtés de la notion d’ «association administrative » doivent être levées à la lumière tant de la jurisprudence de la Cour que de celle du Conseil d’État.

Il peut exister, en effet, des associations alimentées presque totalement par des ressources publiques qui assument des missions de service public, sans que s’applique la jurisprudence de la gestion de fait qui s’attache aux organismes dont l’autonomie n’est qu’une fiction. »